La crise a été au premier plan en 2008. Malgré elle, la Côte-d’Or tient le coup dans plusieurs secteurs. LA « crise ». Ce mot a sans aucun doute été le plus prononcé en 2008. Tout avait pourtant commencé comme « une bonne année ». Fort de ses performances à l’export et du dynamisme indéniable de ses petites et moyennes entreprises (PME), la Côte-d’Or pouvait rêver à des résultats aussi satisfaisants qu’en 2007. Au début de 2008, on ne s’en souvient pas forcément, mais les préoccupations concernaient surtout la baisse du pouvoir d’achat et la hausse du prix du baril de pétrole. A la fin de l’année, nombreux étaient ceux qui s’estimaient heureux d’avoir encore un travail… Mais avant d’en arriver là, revenons sur les réussites. Réussites et espoirs Tout au long de 2008, plusieurs entreprises côted’oriennes se sont distinguées. En janvier, Dyn-Aero (Darois) franchit un cap grâce à la certification de ses appareils (en novembre, la société annonce qu’elle reprendra une partie de la production d’Apex) ; l’entreprise Sacol (Dijon) reprend l’enseigne Visual ; Seb fête ses 150 ans à Dijon ; la radio K6 FMdiffuse ses premières ondes ; l’Européenne de Condiments (Couchey) investit plus de 4 millions d’euros pour accompagner un accroissement de la production. En mars, on apprend que la société suisse Exichol, spécialisée dans les additifs nutritionnels, s’installera à Dijon (34 emplois seront créés). En avril, Barry Callebaut annonce qu’elle va investir 10 millions d’euros à Dijon. En mai, Solar Euromed, spécialisée dans le solaire thermodynamique, annonce qu’elle prévoit 50 embauches d’ici à trois ans. L’entreprise Plasto, spécialisée dans les adhésifs et autres polymères, inaugure un nouvel entrepôt à Longvic : 30 personnes sont déplacées sur la ville ; le casino de Santenay, propriété de Joagroupe (anciennement Moliflor Loisir), va bénéficier de 2,2 millions d’euros et faire d’importants travaux à partir d’automne. En juin, Gewiss (Liernais), victime d’un sinistre en 2006, inaugure un établissement flambant neuf et attend une croissance à deux chiffres pour l’année ; Urgo acquiert l’activité d’Alvityl, leader de la multivitamines pour enfants (et signe, en fin d’année, un accord avec une entreprise canadienne, Advitech, sur le processus de cicatrisation). En juillet, trois projets présentés par Vitagora et un par le Pôle nucléaire de Bourgogne sont retenus pour être financés par l’Etat ; la première tranche des travaux démarre sur la Zone d’activités économiques (ZAE) de Fauverney, qui accueillera notamment FM Logistic ; en tout, 400 emplois sont attendus sur la ZAE. En octobre, Céole, fabricant de tours d’éoliennes, installée sur la zone industrielle de Longvic, inaugure ses locaux ; Dijon Première obtient la fréquence du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). En terme d’événements qui ont des impacts sur l’économie, on peut notamment citer les réussites de la Foire gastronomique (plus de 200 000 en 12 jours) et d’Entreprissimo (qui a réuni plus de 200 entreprises en trois jours). A noter aussi le parc Valmy, qui a connu de nouvelles implantations d’entreprises (les laboratoires Vendôme, etc.). Heureusement, les nouvelles positives et les réussites des entreprises de Côte-d’Or ne s’arrêtent pas là. On en retrouve un grand nombre dans notre supplément Entreprises & Performances. Licenciements inquiétudes, crises Au premier semestre, on notait une progression de l’emploi, notamment dans la construction, le commerce et l’hôtellerie-restauration. Mais déjà, l’effectif industriel connaissait un repli assez sensible. Avec la campagne et les élections municipales et cantonales, les mauvaises nouvelles sont peu nombreuses en mars. En mai, Dijon Céréales annonce la fermeture définitive du moulin de Dijon pour juillet : 53 postes sont supprimés et un Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) est mis en place. Fin juin, l’Insee Bourgogne déclare : « Nous n’avons plus de moteurs pour tirer la croissance. » Ambiance… Le même mois, avec la BA 102 qui risque de fermer, des inquiétudes naissent concernant les 2 200 emplois. De même au niveau de l’aéroport de Dijon-Bourgogne, où une pétition est lancée pour le soutenir. Fin juillet, on apprend que la BA est maintenue, qu’elle sera même renforcée et pérennisée, ainsi que le 511e régiment du train d’Auxonne. La pétition pour l’aéroport récolte plus de 5 000 signatures et Patrick Lafôret, président de la CCI Dijon, prévoit de nouveaux vols avant fin novembre 2009. Fin juillet, on apprend que le site Thomson Bourgogne SAS (Genlis) sera racheté par Novatech, qui s’est engagé à rester pour quatre ans sur le site de Genlis. D’après la direction nationale de Thomson, « les 200 emplois actuels seront transférés avec la société ». Septembre noir En septembre, selon différents experts, côté tourisme, le bilan de l’été est tantôt mitigé, tantôt positif. Le même mois, Neltec Europe SA (Mirebeau-sur- Bèze), qui produit des supports de circuits imprimés, annonce un projet de cessation d’activité (59 employés sont concernés) ; les entreprises Apex Aircraft et Apex industries sont en liquidation judiciaire (les 70 salariés sont licenciés), ce qui a des conséquences sur l’aviation légère française ; le site industriel Sigmakalon Euridep (Genlis) se recentre sur la peinture aqueuse (50 emplois sont menacés) ; le groupe Boisset cède ses spiritueux au groupe La Martiniquaise pour se concentrer sur les bourgognes et les vins effervescents (les 45 salariés concernés par le rachat doivent être repris). Toujours en septembre, la crise financière commence à s’installer progressivement dans le département. Les premières touchées sont d’abord banques (Dexia, BNP, Caisse d’épargne, etc.) mais aussi certaines collectivités, surtout celles qui ont contracté des prêts à taux variables. Les particuliers notent un durcissement de l‘accès au crédit. On remarque aussi que le nombre de prêts sur gage augmente au Crédit municipal Dijon. Sur l’année, l‘immobilier connaît une baisse des prix, aussi bien dans le neuf que dans l’ancien, une diminution du nombre de transaction, une augmentation des délais et des stocks. Chômage technique en fin d’année Liée à la crise ou non, l’annonce fin novembre de près de 300 licenciements chez Amora-Maille (voir ci-contre) préfigure un mois très sombre. Le secteur automobile (5 000 personnes en Côte-d’Or) est touché de plein fouet par la crise : les constructeurs, leurs sous-traitants, les équipementiers et les concessionnaires connaissent un ralentissement de l’activité économique. En outre, les intérimaires sont beaucoup moins sollicités. Conséquence directe, l’entreprise JTEKT connaît une période de chômage partiel avant que la suppression de 110 postes soit envisagée sur les sites de production de Dijon, de Chevigny-Saint-Sauveur et de Saint-Etienne. Le soustraitant TRW à Longvic connaît huit jours de chômage partiel. En décembre en Haute Côte-d’Or, on apprend que Valti, sous-traitant, connaîtra trois semaines de fermeture et que Vallourec & Mannesmann Tubes, qui a pour principal Valti, connaîtra lui quatre semaines de fermeture. Du côté de la production de médicaments, le site Fournier, à Fontaine-lès- Dijon, connaît des grèves à répétition pour obtenir une prime liée à la vente du site à Recipharm. Reflet ou non du marché, la vente des vins de Beaune a connu cette année une baisse de 26,42 % la pièce. La Bourgogne souffre, notamment en Grande- Bretagne, premier marché export des vins bourguignons. Louis-Fabrice Latour, président du syndicat des négociants en vins de Bourgogne, table sur une baisse du chiffre d’affaires 2008 du négoce qui pourrait être de l’ordre de 5 à 10 %.
Vincent LINDENEHER
Amora-Maille, un naufrage ? (photo Arnaud Finistre) L’électrochoc pour Amora
Le 20 novembre, la nouvelle tombe et fait très mal. Le groupe anglonéerlandais Unilever, propriétaire d’Amora-Maille depuis 2000, annonce la fermeture de l’usine historique de Dijon et de l’usine de conditionnement de cornichons à Appoigny (Yonne) ; l’activité logistique de Chevigny-Saint- Sauveur doit quant à elle être transférée sur la plate-forme de FM Logistic à Fauverney. Les syndicats parlent de 296 suppressions de postes liées à cette restructuration, la direction, de 265. Certains notent le fait qu’Amora- Maille a réalisé en 2007 un chiffre d’affaires de 207 M€, pour un résultat net de 25,2 M€. Dès lors, le combat pour sauver les emplois à Dijon est lancé. Le 21 novembre, les représentants du personnel sont reçus par le maire de Dijon, qui les soutient. Le 25, de nombreux politiques, de tous bords, affichent leur mobilisation. Le 27, une cinquantaine de salariés de l’entreprise, soutenue par des sénateurs et des députés de Côted’Or, se rend à Paris pour tenter d’obtenir un accord avec Unilever. Leurs espoirs sont déçus ; seules des « promesses d’accompagnement » à la restructuration sont annoncées. Début décembre, les soutiens aux salariés d’Amora ne cessent de se multiplier. Le 6 décembre, plus de 3 000 personnes défilent dans les rues de Dijon pour demander le maintien des postes sur les sites concernés. Se joignent à se mouvement une bonne partie des 86 employés d’Unilever France, aussi affectés par la restructuration et à qui il a été annoncé le projet de fermeture du site de Dijon (une suppression de 26 postes est prévue). Le 11 décembre, une réunion autour du préfet, avec les syndicats, la direction et les élus, a de nouveau un goût amer. Pour la direction, la restructuration semble déjà entamée. Depuis, les actions des syndicats n’ont pas cessé. A noter l’exposition, intitulée « Il n’est de moutarde que de Dijon », à l’hôtel de ville (jusqu’au 21 janvier), qui est un bon moyen de maintenir la pression. Le 6 janvier, de nouvelles négociations seront entamées avec la direction. Les syndicats comptent remonter au front à cette occasion
Le Bien Public,lundi 29 décembre 2008